Voici les raisons pour lesquelles le deuil que vous traversez aujourd’hui est un deuil si particulier et encore souvent peu reconnu.
La brutalité ou l’imprévisibilité du décès
Perdre votre bébé alors que vous vous attendiez à l’accueillir dans votre vie comporte une dimension déstabilisante pouvant être traumatique.
Un état de « choc » peut survenir (être sans mots ou incapable de penser). Il peut être bref ou perdurer dans le temps, et des réactions apparentées au stress post-traumatique peuvent survenir. De plus, des questions peuvent rester sans réponse.
Le lien affectif avec le bébé
La plupart des parents établissent un lien bien avant la naissance du bébé, et parfois avant même sa conception. Vous avez probablement déjà imaginé votre bébé et la vie que vous alliez vivre ensemble. Peut-être aviez-vous entendu battre son cœur ou vu des images lors de l’échographie.
La formation du lien affectif avec l’enfant débute à différents moments pour chaque parent. Cela permet d’intégrer votre petit bébé « rêvé » dans la réalité.
Les pertes multiples
En perdant votre bébé, c’est tout un rêve qui s’envole. C’est la perte d’un avenir, d’un enfant désiré, d’une famille que l’on voulait agrandir, de votre sentiment d’être un parent, des espoirs que vous aviez pour cette nouvelle vie qui commençait. Cette perte et la fin de la grossesse que vous avez pu idéaliser rend l’avenir sans votre bébé difficile à envisager.
L’absence de souvenirs concrets
Contrairement à une personne ayant vécu, il existe peu de souvenirs, de moments partagés lorsque décède un bébé et que vous devez vous en séparer rapidement. Cela peut rendre la mort de votre bébé irréelle et plus difficile à surmonter.
Le manque de reconnaissance sociale
Il se peut que vous receviez peu de reconnaissance sociale et psychologique. Même si votre perte est réelle et que la mort de votre bébé constitue un vide immense, certaines personnes ont tendance à minimiser les émotions d’un deuil périnatal. Elles sont la plupart du temps mal à l’aise et ne s’imaginent pas la profondeur de votre lien d’attachement avec votre enfant car elles ne l’ont pas connu.
De plus, certains parents n’ont pas pu offrir de rituel ou de cérémonie pour souligner le passage de leur bébé dans leur vie. Cela empêche parfois leur entourage de réaliser l’ampleur de la souffrance qui les touche, notamment ceux dont un des jumeaux est décédé. Beaucoup de parents se sentent seuls et demeurent habités par un sentiment de culpabilité difficile à partager.
Le vécu dans le corps
La grossesse est une expérience sensorielle. La femme qui vit la mort de son bébé peut avoir le sentiment de perdre une partie d’elle-même. Certaines femmes parlent de vide intérieur. De plus, les cicatrices, les douleurs résiduelles après l’accouchement ou la montée laiteuse peuvent être particulièrement pénibles à vivre étant donné le contexte.
Quant au père, il peut se sentir atteint dans son identité en tant que protecteur de sa partenaire et de la famille.
« Quand le tout petit meurt in utéro ou peu après, la mère doit se défaire d’une partie d’elle-même non séparée ni corporellement ni psychiquement. Il s’agit d’un deuil dans sa chair qui réveille ses sensations les plus archaïques de corps à corps avec sa propre mère. Cela la renvoie à la question du maternel et de la féminité. »
Soubieux1 (2013)