Afin d’estimer la proportion d’enfants ayant déjà contracté le virus de la COVID-19, une équipe du CHU Sainte-Justine a été mandatée pour réaliser un exercice de surveillance de la proportion d’enfants de moins de 18 ans ayant une réponse en anticorps contre la COVID-19 (séroprévalence).
De premières données ont été rendues publiques pour la grande région de Montréal au mois de février 2022.
Une mise à jour de ces données est désormais disponible. Et, grâce à la collaboration avec des partenaires du CHU de Québec (CHUL) et du CISSS du Bas-Saint-Laurent (Hôpital régional de Rimouski), un aperçu de la situation est également présenté pour d’autres régions du Québec.
De plus, bien qu’Héma-Québec fasse déjà la surveillance de la proportion de donneurs de sang qui ont une réponse en anticorps contre la COVID-19, le ministère de la Santé et des Services sociaux a mandaté le CHU Sainte-Justine d’évaluer la représentativité de cette cohorte. Ainsi, avec la collaboration du CHU de Québec (Hôpital de l’Enfant-Jésus), de la grappe Optilab Montréal CHUM (Hôpital Maisonneuve-Rosemont) et du CISSS du Bas-Saint-Laurent (Hôpital régional de Rimouski), des données sont également disponibles pour la population adulte dans différentes régions.
Méthode
Le CHU Sainte-Justine et ses partenaires récupèrent les échantillons sanguins résiduels d’enfants et d’adultes qui se présentent aux urgences de leur centre hospitalier et qui ont un prélèvement sanguin (prise de sang), et ce, peu importe la raison (Ex. : formule sanguine complète, bilan hépatique ou rénal). Ces échantillons, qui seraient normalement détruits, sont anonymisés et envoyés au laboratoire d’Héma-Québec pour la recherche sérologique d’anticorps contre le SRAS-CoV-2.
Une personne infectée par la COVID-19 développe deux types d’anticorps (IgG) : des anticorps contre la protéine de la nucléocapside (N) et d’autres contre la protéine de spicule (S). Toutefois, une personne vaccinée ne développe que des anticorps contre la protéine S (Fig. 1).
Les anticorps (IgG) apparaissent environ 2 semaines après l’infection ou la vaccination.
Mise à jour des résultats
Population pédiatrique
Au CHU Sainte-Justine, du 17 juin au 22 novembre 2021, soit avant la vague Omicron, 25 % des enfants âgés de 0 à 4 ans et près de 30 % des enfants âgés de 5 à 11 ans avaient des anticorps contre la nucléocapside (N), ce qui signifie qu’ils avaient été infectés naturellement contre la COVID-19 (Fig. 2).
Du 28 janvier au 21 février 2022, soit pendant la vague Omicron, ces proportions ont augmenté à 34 % et 46 %, respectivement. (Fig. 2).
On note par ailleurs que les enfants de Québec et de Rimouski ont des proportions de séropositivité un peu moins élevées. Les prélèvements analysés ont été faits du 22 février au 10 mars 2022 à Québec et du 24 mars au 4 avril 2022 à Rimouski (Fig. 3).
Population adulte
Au sein de la population adulte, seule la réponse à la protéine N a été testée, puisqu’une grande majorité des adultes avait déjà été vaccinée au moment du prélèvement à l’hiver 2022. On remarque une différence importante dans la proportion d’adultes ayant des anticorps contre la protéine N dans les différentes régions. Un peu plus de 42 % des adultes prélevés entre le 22 et le 26 février 2022 avaient des anticorps contre la protéine N, à Montréal (HMR) contre 22 % à Québec et à 24 % à Rimouski, signe que la transmission communautaire de la COVID-19 a été plus importante à Montréal que dans le reste de la province jusqu’à la 5e vague (Fig. 4).
Limites
Il faut toutefois tenir compte de certaines limites dans l’analyse de ces résultats, par exemple, du phénomène de séroréversion, c’est-à-dire que les anticorps peuvent se perdre au fil du temps et devenir indétectables. De plus, les personnes vaccinées qui développent malgré tout une infection peuvent ne pas développer d’anticorps contre la nucléocapside (N).
De plus, la population à l’étude est limitée aux enfants et adultes ayant fréquenté une salle d’urgence et ayant nécessité une prise de sang. Bien que cette population ne soit pas nécessairement représentative de la population générale, ces individus ne devraient pas, en théorie, être plus à risque d’avoir été exposés au SRAS-CoV-2.
Finalement, puisque les anticorps ne sont pas présents lors de la maladie aiguë, les individus qui se seraient présentés aux urgences pour une COVID-19 ne devraient pas encore avoir développé d’anticorps contre la protéine N au moment de leur prise de sang.
Prochaines étapes
Une prochaine ronde d’analyses devrait avoir lieu sous peu. Les échantillons sanguins résiduels d’enfants qui se présenteront aux urgences ou au centre de prélèvement de leur centre hospitalier (CHUSJ, CHUL et Rimouski) et qui auront un prélèvement sanguin (prise de sang) à compter de la semaine du 23 mai, 2022 seront à nouveau envoyés à Héma-Québec pour être analysés. Ceci nous donnera une idée des infections acquises au cours de la 6e vague (BA.2).
AUTEURS
- Caroline Quach, M.D., M. Sc., microbiologiste-infectiologue (CHU Sainte-Justine)
- Christian Renaud, M.D., microbiologiste-infectiologue (Héma-Québec et CHU Sainte-Justine)
COLLABORATEURS
CHU Sainte-Justine et Université de Montréal
- Émilie Vallières, M.D., Ph. D., microbiologiste-infectiologue
- Marc Desforges, Ph. D.
CISSS du Bas-Saint-Laurent, Hôpital régional de Rimouski
- Patrick Dolce, M.D., microbiologiste-infectiologue
CHU de Québec, Centre hospitalier de l’Université Laval (CHUL)
- Marie-Louise Vachon, M.D., M. Sc., microbiologiste-infectiologue
- Marie-Claude Beaudoin, M.D., microbiologiste-infectiologue
CHU de Québec, Hôpital Enfant-Jésus (HEJ)
- Vilayvong Loungnarath, M.D., microbiologiste-infectiologue
Grappe Optilab CHUM, Hôpital Maisonneuve-Rosemont (HMR)
- Christian Lavallée, M.D., microbiologiste-infectiologue
Héma-Québec
- Renée Bazin, Ph.D, Directrice innovation
COORDINATION
- Zineb Laghdir, coordonnatrice de recherche
- Équipe de recherche :
- Louise Wang, Verinsa Mouajou, Marie-Ève Benoît, assistantes de recherche, CHUSJ
- Isabelle Chabot, coordonnatrice de recherche clinique, Centre de recherche en infectiologie de l’Université Laval
- Stéphanie Beauchemin, assistante de recherche, HMR
REMERCIEMENTS À
- Mme Leila Rabaamad, laboratoire central CHU Sainte-Justine
- Mme Josée Perreault (Héma-Québec)
Direction des communications et relations publiques du CHU Sainte-Justine
- Mme Anne-Julie Ouellet, directrice
- Mme Lucie Dufresne, adjointe à la directrice
- Mme Justine Mondoux-Turcotte, conseillère
- Mme Laurie-Jane Cloutier-Gagnon, designer graphique