Afin de souligner la Journée internationale des femmes et des filles de science, le CHU Sainte-Justine souhaite vous présenter le parcours exceptionnel de la Dre Mélanie Henderson et de son équipe de recherche. Avec l'infirmière de recherche Maryse Thibeault, la stagiaire postdoctorale Soren Harnois-Leblanc, et tous les membres de son laboratoire, Dre Henderson œuvre jour après jour à comprendre les maladies cardiométaboliques pour améliorer la santé des enfants du Québec.
Parlez-moi de ce qui vous a amenées en recherche?
M.H. Au début de mon parcours académique, je ne savais pas comment les étudiants réussissaient à faire tous les cours en médecine en plus du doctorat pour devenir MD/PhD. Mais en fin de compte, c’est ce que j’ai fait! Mon choix s’est arrêté sur l’endocrinologie pédiatrique, car il y avait une grande variété de maladies pour lesquelles nous avions des solutions. Puis, j’ai voulu approfondir mes connaissances et mener les recherches moi-même, ce qui m’a amenée à faire une maîtrise, puis un doctorat en épidémiologie. Mon travail clinique nourrit ma recherche, qui à son tour, améliore mon approche clinique.
M.T. En tant qu’infirmière, c’est le hasard qui m’a éventuellement amenée en recherche et mon cœur y est resté! Une part importante de mes fonctions consiste à jouer un rôle pivot entre les familles, les médecins et l’équipe de recherche. Mon travail très varié touche différentes spécialités. Au cours d’une semaine, je peux recruter des patients, présenter le projet de recherche à la famille, faire des prélèvements, suivre l’administration de médicaments, compiler les données, réviser les budgets de recherche, etc. Mais ce que j’aime par-dessus tout, c’est la liaison prolongée et privilégiée que la recherche me permet de tisser avec les patients. Les besoins des patients orientent nos recherches, puis on redonne par le développement de meilleures pratiques. C’est le meilleur des deux mondes!
S.H-L. Après mon baccalauréat en nutrition, j’ai choisi de faire une maîtrise de recherche en science de la santé durant laquelle je me suis intéressée à l’épidémiologie en santé publique. J’ai souhaité me joindre à l’équipe de Dre Henderson pour mes études de doctorat, car ses travaux de recherche sur les maladies métaboliques étaient en ligne droite avec mes intérêts personnels. Je suis avec l’équipe depuis maintenant 5 ans, ayant tout récemment obtenu mon diplôme de doctorat!
En quoi consistent les travaux de votre équipe de recherche?
M.H. Je me passionne pour la prévention des maladies cardiométaboliques. Avec mon équipe, nous travaillons à identifier les stratégies les plus prometteuses pour prévenir les maladies et en atténuer les impacts. Notre travail s’articule autour de trois projets majeurs. À travers les projets CARDEA et QUALITY, nous cherchons à identifier les déterminants de la maladie cardiovasculaire chez deux populations vulnérables, soit les jeunes avec un parent biologique vivant avec l’obésité (QUALITY) et chez les jeunes atteints d’un diabète de type 1 (CARDEA).
Avec le projet CIRCUIT (Centre pédiatrique d'intervention en prévention et en réadaptation cardiovasculaire pour toute la famille), nous offrons aux familles ayant un jeune en surpoids une intervention personnalisée pour améliorer sa santé. La clé, c’est d'agir dès l'enfance et, surtout, de prendre plaisir à bouger en famille ou entre amis.
S.H-L. La Dre Henderson voit grand pour les enfants du Québec! Le projet CIRCUIT, qui a fait ses preuves en milieu urbain, vérifie maintenant sa formule en milieu rural et régional. Des discussions sont en cours avec différents groupes ministériels pour un déploiement à grande échelle. Le programme CIRCUIT aspire à devenir un laboratoire de prévention pour la santé. En identifiant l’effet d’indicateurs biologiques et des différentes habitudes de vies sur la santé, il est possible de mieux cibler nos efforts et d’intervenir efficacement en amont de la maladie.
Mère et scientifique, est-ce possible?
M.H. Maintenir l’équilibre travail-famille pour une femme en recherche est une quête de tous les instants! Il faut être très bien organisée comme maman, tout en s’ajustant aux imprévus qui sont nombreux, et surtout avoir beaucoup d’humour! J’ai la chance d’avoir un conjoint extraordinaire qui m’appuie énormément. Il est évident que concilier une carrière en recherche et en clinique avec une vie de famille peut être un grand défi, mais c’est également un grand bonheur. Aussi, je pense que les mères en recherche peuvent représenter un modèle inspirant pour leurs enfants, car elles montrent qu’il est possible de s’accomplir tant sur le plan professionnel que personnel.
M.T. Dans notre équipe, l'équilibre entre le travail et la vie de famille est très favorisé. C’est inspirant pour la prochaine génération de chercheuses, d’infirmières et d’étudiantes et d’étudiants en recherche.
Quels sont les défis de la recherche au féminin?
S.H-L. Les femmes apportent une diversité en recherche qui est essentielle. La compassion, la curiosité, l’entraide et la rigueur sont des qualités sur lesquelles les femmes attachent beaucoup d’importance. De plus, un écart significatif persiste au niveau des connaissances sur la santé des femmes en général. Les maladies cardiovasculaires et la perception de la douleur, très différentes chez les femmes, ne sont que deux exemples. Avoir plus de femmes en recherche pour s'attaquer à ces sujets ne peut qu’être bénéfique.
M.H. Avec le temps, la recherche se féminise de plus en plus. Les femmes prennent la place qui leur revient. Présentement, deux tiers des membres de mon équipe sont des femmes. Mes travaux et ma pratique médicale me portent à étudier de grandes cohortes d’enfants et leur famille, ce qui nécessite un travail d’équipe hors pair. Les intervenantes et intervenants occupent tous une importance critique, que ce soit l’infirmière de recherche, la nutritionniste, la psychoéducatrice, la coordonnatrice de recherche, les étudiantes et les étudiants. J’apprécie leurs différences culturelles, leurs formations académiques variées et leur différence en âge. C’est ma deuxième famille! Je suis très choyée d’être entourée de toutes ces personnes incroyables, dont la contribution est moins connue.
Quel est le secret de la réussite en recherche?
M.H. Que l’on soit une femme ou non, dans un parcours scientifique, il y a des moments où des gens vont douter de nos capacités. Il ne faut pas se laisser ébranler ni décourager par les défis encourus. Il faut foncer et démontrer ce que l’on sait faire. Je travaille à encourager mes étudiantes et mes étudiants à atteindre leur plus haut potentiel. Rêver grand, viser haut et y mettre son énergie, sa persévérance et sa passion! Ce sont pour moi les ingrédients de la réussite.
De gauche à droite : Jessica Piché PhD, Dre Mélanie Henderson MD/PhD, Catherine Pelletier, Maryse Thibeault et Soren Harnois-Leblanc PhD.
© Photographie CHU Sainte-Justine (Charline Provost)