De gauche à droite : Stéphanie Benoît, Dre Joanna Dziubinska, Dre Elsa Rossignol, Dre Nathalie Alos, Judith Laforest. Absente sur la photo : Dre Céline Belhumeur. © CHU Sainte-Justine
Depuis 2014, la Clinique du syndrome de Rett du CHU Sainte-Justine prend en charge des familles ayant un enfant atteint de cette maladie neurodéveloppementale sévère qui atteint environ une fille sur 10 000 dans le monde. Avec à sa tête la Dre Elsa Rossignol, neurologue pédiatre et clinicienne-chercheuse, cette clinique multidisciplinaire unique au Québec collabore avec de nombreux partenaires pour la prise en charge des jeunes de partout dans la province. À l’écoute des familles et de leurs besoins, elle participe aussi activement à la recherche de nouveaux traitements afin d’améliorer la qualité de vie des jeunes qui en sont atteintes.
En ce Mois de sensibilisation au syndrome de Rett, découvrez cette équipe pleinement engagée envers l’amélioration de la qualité de vie des patientes et de leur famille.
Une collaboration multidisciplinaire unique
Plusieurs symptômes ou complications courantes du syndrome de Rett requièrent l’attention de différents médecins spécialistes ou professionnelles ou professionnels de la santé. C’est pourquoi l’équipe inclut une neurologue pédiatre (Dre Elsa Rossignol), une médecin spécialiste de la santé osseuse (Dre Nathalie Alos), une médecin spécialiste du sommeil (Dre Céline Belhumeur, photo ci-contre), une physiatre (Dre Joanna Dziubinska), une nutritionniste (Stéphanie Benoît) et une infirmière clinicienne (Judith Laforest), en plus de travailler en étroite collaboration avec les cliniques de gastroentérologie et d’orthopédie. Chaque spécialiste ou thérapeute est responsable d’un volet de la prise en charge, dans un but commun : assurer le bien-être non seulement de la patiente, mais aussi de l’ensemble de la famille. Cette proximité des médecins et thérapeutes environ une fois par mois est essentielle pour trouver rapidement des solutions communes aux problèmes de santé des patientes, selon la nutritionniste Stéphanie Benoît : « Par exemple, si j’ai une patiente dans mon bureau qui n’a pas d’appétit en raison d’un médicament prescrit pour son épilepsie, je peux tout de suite aller voir la Dre Rossignol dans son bureau pour voir si on peut ajuster la médication. Si la Dre Alos constate un problème au niveau de la santé osseuse d’une jeune, elle peut cogner à ma porte pour qu’on bonifie sans délai l’alimentation de la patiente. »
Cette façon de fonctionner exige une grande flexibilité de la part des membres de l’équipe. « Il faut savoir s’adapter! », s’exclame Judith Laforest, infirmière pivot et coordonnatrice de la clinique de Rett. « Mon rôle est de trouver des moments où tous les spécialistes sont disponibles, en fonction des besoins de chaque patiente. Et parfois, on se rend compte lors d’un rendez-vous qu’une patiente va moins bien qu’on pensait, et on doit alors réorganiser l’horaire pour s’assurer qu’elle puisse être vue par le bon professionnel. » Une capacité d’adaptation un peu à l’image de celle des familles suivies : « Ce qui m’impressionne, c’est de voir tout l’amour dans les yeux des parents et de constater à quel point ils sont impliqués dans les soins, poursuit l’infirmière pivot. Ils veulent le meilleur pour leur enfant et ils sont présents, même si cela requiert énormément de rendez-vous, de temps et de déplacements. On voit que pour eux, leur enfant, c’est leur petit rayon de soleil. »
Recherche d’un traitement : une mobilisation qui va au-delà de la clinique
Plusieurs études sont en cours en vue de prendre en charge les familles d’une manière qui réponde à leurs besoins. Ainsi, des parents suivis à la clinique du syndrome de Rett ont été sollicités pour faire part de leur vécu, afin d’axer la prise en charge sur leurs priorités. L’équipe s’intéresse aussi à la santé osseuse et à la prévention des fractures, aux biomarqueurs électrophysiologiques permettant de mieux suivre la progression de la maladie, ainsi qu’à l’évolution naturelle de la maladie en tenant compte des complications systémiques qui s’ajoutent à l’impact de l’atteinte neurologique. Depuis deux ans, la Dre Rossignol dirige également un essai clinique visant à évaluer l’efficacité d’une thérapie génique pour le syndrome de Rett (voir plus bas). Une étude exigeante, mais avant-gardiste et qui suscite énormément d’espoir pour les familles. « Cette étude n’aurait pas pu avoir lieu sans la collaboration précieuse non seulement de l’Unité de recherche clinique du centre de recherche, des membres de la clinique de Rett, mais aussi d’autres spécialités comme la radiologie, l’anesthésie, l’ophtalmologie, la cardiologie, … Il y a énormément de gens impliqués à travers l’hôpital et leur apport est essentiel : si les bénéfices sont validés avec les participantes et que tout est bien toléré, le fait que le CHU Sainte-Justine ait piloté cet essai clinique permettra d’accélérer l’accès au traitement pour les familles du Canada. »
Au-delà du CHU Sainte-Justine, la clinique agit aussi en appuie aux écoles et offre du soutien ponctuel pour des patientes suivies dans des cliniques à travers le Québec. Prochaine étape : établir un partenariat avec un autre centre hospitalier non pédiatrique pour établir une clinique multidisciplinaire prenant en charge les patientes adultes atteintes du syndrome de Rett. « Mon objectif est d’assurer un véritable continuum de soins pour les familles, qui ont besoin de soutien à très long terme », souligne la Dre Rossignol.
Un essai clinique prometteur
Depuis deux ans, le tout premier essai clinique visant à évaluer l’efficacité d’une thérapie génique pour atténuer les symptômes du syndrome de Rett chez les adolescentes et les jeunes adultes a été lancé au CHU Sainte-Justine, seul site canadien et premier site au monde. Les résultats prometteurs de cette étude ont permis de lancer un volet pédiatrique visant à traiter les jeunes filles atteintes du syndrome de Rett dans plusieurs sites américains et qui s’amorce au CHU Sainte-Justine cet automne. « Jusqu’à maintenant, les patientes qui ont une épilepsie sévère ne convulsent plus ou très peu, explique la Dre Rossignol, chercheuse principale. On constate aussi des améliorations très intéressantes chez l’ensemble des participantes au niveau de l’intérêt à communiquer, de l’usage des mains, de la respiration et du sommeil, avec peu d’effets secondaires notables liés à la thérapie. » La phase pédiatrique de l’essai ayant récemment obtenu l’approbation de Santé Canada, un nombre restreint d’enfants suivis à la clinique de Rett du CHU Sainte-Justine devraient pouvoir bénéficier de cette thérapie dans les prochains mois. Ces résultats suscitent un grand espoir pour de nombreuses familles, qui souhaiteraient que leur enfant puisse bénéficier de la thérapie génique. « Nous n’en sommes pas encore là, précise la clinicienne-chercheuse. Les places sont très restreintes, nous ne pouvons donc pas encore offrir cette thérapie à l’ensemble de nos 35 patientes. Mais évidemment, notre souhait le plus cher, si les résultats chez l’enfant se confirment, serait que toutes nos patientes qui le souhaitent puissent être traitées éventuellement par une telle thérapie lorsque celle-ci sera approuvée sur une base clinique. »