© CHU Sainte-Justine (Véronique Lavoie)
La clinique Tourette du CHU Sainte-Justine se distingue par son expertise et son dévouement exceptionnel à l’accompagnement des enfants atteints du syndrome Tourette. En tant que seule clinique surspécialisée au Québec pour la clientèle pédiatrique, elle offre des services de diagnostic, d'intervention et de sensibilisation. La clinique est constituée d’une équipe multidisciplinaire qui travaille avec bienveillance pour améliorer la qualité de vie des jeunes patients et pour informer sur cette condition souvent mal comprise. Dans le cadre du mois de sensibilisation au syndrome Tourette, Dre Inge Meijer, neurologue à la clinique, et Emeline Zarlenga, infirmière clinicienne et coordinatrice clinique, mettent la lumière sur la mission, les défis et les projets prometteurs de l’équipe.
Quel est le grand mythe concernant le syndrome Tourette ?
Le mythe le plus répandu est la caricature souvent colportée, que les personnes atteintes de ce syndrome répètent des insultes (coprolalie) ou font des gestes grossiers (copropraxie). En réalité, ces symptômes rares ne touchent qu’une minorité des patientes et patients. Un autre mythe répandu présume que les personnes ayant des tics sont forcément anxieuses.
De plus, le syndrome Tourette est un trouble neurodéveloppemental, caractérisé notamment par des tics qui atteignent leur pic à l'âge d’environ 10 ans, et tend ainsi à s’atténuer voire à disparaitre à l'âge d’adulte. D’ailleurs, de nombreuses personnes qui en sont atteintes mènent une vie épanouie et réussissent à bien vivre avec leurs tics au quotidien.
Comment accompagnez-vous les enfants atteints du syndrome de Tourette ?
Notre travail vise à brosser un portrait clair du profil de l’enfant ayant des tics et d’établir, avec lui et sa famille, les différents besoins et moyens pour y répondre. Les besoins des jeunes ayant un syndrome de Tourette peuvent en effet être très variés. Nous leur fournissons donc des recommandations adaptées à leur profil et les référons aux services appropriés.
Pour les patientes et patients qui ont des tics avec un impact fonctionnel (syndrome Tourette et troubles de tics chroniques), nous intervenons dans les cas les plus complexes, souvent quand les symptômes sont douloureux, dérangeants ou dangereux. Nous leur proposons ainsi des services cliniques ou, si nécessaire, des références vers d'autres spécialistes.
Enfin, nous cherchons surtout à aider les enfants et leur famille à normaliser le syndrome Tourette, tout en déconstruisant les mythes et les stéréotypes qui existent sur internet ou dans la culture populaire et en centrant notre approche sur le patient. Pour ce faire, nous travaillons également en collaboration avec l’Association québécoise du syndrome de la Tourette (AQST).
Quelle est votre approche vis-à-vis des patientes et patients atteints du syndrome ?
Nous orientons notre démarche et concentrons nos efforts sur les besoins réels et le vécu de l’enfant, plutôt que sur ceux de leur environnement, comme leur famille, les équipes des écoles ou les autres intervenants. Pour les accompagner dans leur cheminement, nous leur offrons, au-delà de la thérapie des tics, un enseignement thérapeutique qui vise à comprendre leur condition, apprendre à gérer leurs symptômes et répondre aux questions d’autrui. Nous les outillons donc à mieux vivre avec le syndrome et à y sensibiliser leur entourage.
Quels défis rencontrez-vous dans votre travail au quotidien ?
Le principal défi est, étonnamment, la méconnaissance du syndrome Tourette dans le réseau de la santé. Beaucoup de professionnels ne sont pas assez formés pour diagnostiquer, évaluer et traiter ce syndrome. Il en résulte un manque de services adéquats et une inégalité dans l’offre de services et l’accessibilité, surtout à travers les régions. De plus, étant la seule clinique surspécialisée au Québec et œuvrant avec peu d’effectifs, nous devons former d'avantage le réseau.
Envisagez-vous de former d’autres centres et d’autres professionnelles et professionnels de la santé au Québec afin de pallier ce manque d’expertise ?
En effet ! Un grand projet philanthropique (TICS) de trajectoire de soins et de formation, dont l’échéancier s’étend sur cinq ans, est actuellement en chantier pour former le réseau de la santé, revoir les trajectoires de soins et soutenir la première et deuxième ligne en tant que centre surspécialisé. Nous utilisons le télé-mentorat (dans le cadre du programme ECHO) pour les milieux scolaires et le réseau de la santé, et nous offrons également des formations pour les parents et les patients de la clinique.
En quoi se distingue votre équipe et votre approche ?
Nous sommes une équipe multidisciplinaire très soudée et nous travaillons constamment en étroite collaboration pour offrir à l’enfant un service et des soins de grande qualité. Notre approche et centrée sur les besoins réels de l’enfant et ne s’arrête pas au diagnostic : nous avons un mandat d’enseignement, de formation continue, de thérapie et d’interventions ciblées.
Le mot de la fin ?
En somme, notre rôle principal est de prendre en charge et de soutenir les jeunes atteints du syndrome de Tourette ou de troubles de tics chroniques, du diagnostic à l’intervention spécifique.
De plus, nous continuons à développer notre expertise, à innover en introduisant de nouvelles approches et thérapies ainsi qu’à transmettre nos connaissances, dans le but d’offrir les meilleurs soins standardisés dans la province.
Avoir des trajectoires harmonieuses et optimisées pour les patientes et patients ainsi que des professionnels de la santé outillés pour prendre en charge la clientèle sont des démarches essentielles afin d’améliorer la qualité de vie des enfants et de leur famille.