Décrivez de manière vulgarisée la nature de vos travaux de recherche actuels :
MH : Je m’intéresse aux facteurs de risque des maladies cardiovasculaires chez le jeune, tout particulièrement les enfants et adolescents à risque, par exemple les enfants avec un surpoids ou de l’obésité et les enfants avec diabète de type 1. Je m’intéresse au développement du diabète de type 2 chez les enfants, et les stratégies de prévention de l’obésité et du diabète de type 2.
MP : Ma recherche a pour objectif le traitement des maladies du foie par le moyen de la médecine régénératrice. Seuls au Canada et grâce à des méthodes novatrices, nous utilisons les cellules souches dérivés du sang de patients pour générer des cellules du foie ainsi que des foies en miniature (organoïdes hépatiques) avec lesquels nous étudions les maladies hépatiques et cherchons de nouveaux traitements. Nous avons développé un produit basé sur les cellules souches humaines qui, une fois transplanté, permet de traiter l’insuffisance hépatique aiguë et chronique sans besoin de médicaments anti-rejet.
AT : Mon laboratoire s’intéresse à la biologie des processus responsables de maintenir l’équilibre du métabolisme en réponse à la prise alimentaire ou à une dépense énergétique. Ce contrôle au niveau cellulaire est assuré par une famille de régulateurs qu’on appelle récepteurs nucléaires puisqu’ils agissent au niveau de l’ADN contenu dans les noyaux des cellules. On a récemment identifié de nouvelles approches afin d’apporter de nouvelles solutions de traitement pour corriger les défauts du métabolisme associés à l’obésité, au cholestérol et au diabète.
Quel est votre rêve le plus fou en lien avec vos recherches?
MP : Pouvoir générer, à même mon laboratoire, des foies complets et fonctionnels à partir de cellules souches ce qui permettrait de remplacer les organes malades de mes petits patients et guérir leur maladie hépatique en utilisant seulement leurs propres cellules, sans besoin d’attendre pour un donneur et sans médicaments à vie.
AT : Notre rêve est de développer des approches qui favorisent le développement et l’activité des mitochondries afin d’utiliser à des fins énergétiques et de métabolisme cellulaire les réserves de gras en excès de l’organisme. Ce contrôle permettrait de minimiser les effets néfastes des dépôts de gras dans les différents organes et le processus d’inflammation qui y est souvent associé.
Où voyez-vous votre champ d’expertise dans 10 ans?
MH : Je crois que nous aurons acquis de meilleures connaissances quant au mécanisme prédisposant au développement des maladies cardiométaboliques chez les enfants, les facteurs de risque modifiables, nous permettant de développer des stratégies de prévention efficace et personnalisée.
MP : Dans 10 ans, les thérapies basées sur la médecine régénératrice et les cellules souches seront désormais une réalité pour les enfants et adultes avec maladies du foie. Plusieurs produits prometteurs basés sur les cellules souches vont avancer vers les lits des patients d’ici quelques années avec d’importants bénéfices pour tous les patients souffrants de plusieurs conditions hépatiques.
AT : La recrudescence de l’obésité et du diabète dans le monde reste alarmante. Notre défi est de développer des solutions de traitements ciblées et personnalisées qui visent à maximiser les effets bénéfiques multitâches des récepteurs nucléaires sur les corrections des défauts du métabolisme tout en éliminant les effets secondaires qu’ils peuvent créer. Dans les années qui viennent, l’accès en clinique des profils géniques et l’analyse complète des métabolites chez les patients nous permettraient ainsi d’identifier la solution exacte de traitement pour chaque individu.
Pourquoi au CHU Sainte-Justine excelle-t-on dans ce pôle?
MH : Notre force repose dans l’excellence des chercheurs travaillant dans le domaine de la santé cardiométabolique, la richesse de leurs collaborations, et les idées innovantes qui nourrissent leur recherche. Ceci se jumelle à des approches novatrices et uniques qui inspirent notre prise en charge clinique, tel le Centre CIRCUIT, offrant à la fois un programme clinique et une infrastructure pour évaluer de nouvelles stratégies.
MP : C’est le seul centre de transplantation hépatique pédiatrique au Québec, et le seul centre au Canada possédant un laboratoire de thérapie cellulaire dédié aux maladies du foie. Cette expertise, avec le rôle historique de chef de file mondial dans l’étude et le traitement de la tyrosinémie (une maladie génétique rare du foie) fait du pôle un leader international dans l’étude et le traitement des maladies hépatiques de l’enfant. Il s’agit d’un des exemples d’excellence que l’on retrouve à l’intérieur de ce pôle.
AT : Il existe dans le pôle une longue et riche tradition de soins et de recherche de plusieurs maladies génétiques au Québec. Les approches de dépistage, d’intervention et de prévention constituent une force du pôle. En particulier, le dépistage néonatal de la tyrosinémie héréditaire de type 1 qui fait maintenant partie du Programme québécois de dépistage néonatal du MSSS a été développé par des chercheurs du pôle. Le CHUSJ est aussi un centre leader au Canada pour le suivi des maladies gastro-intestinales et hépatiques de l’enfant.
Légende
Mélanie Henderson (MH) est endocrinologue pédiatre, chercheure et co-directrice du Centre d'intervention en prévention et en réadaptation cardiovasculaires (CIRCUIT); professeure adjointe de clinique au Département de pédiatrie de l’Université de Montréal
Massimiliano Paganelli (MP) est gastroentérologue-hépatologue pédiatre et chercheur; professeur adjoint de clinique au Département de pédiatrie de l’Université de Montréal
André Tremblay (AT) est chercheur; professeur titulaire au Département d'obstétrique-gynécologie et au Département de biochimie de l’Université de Montréal