Présentation et conservation
- Fioles injectables 1 % (10 mg/mL), 2 mL
- Seringues injectables 2 % (20 mg/mL), 5 mL disponibles dans les chariots de réanimation (chariots de code rose)
- Sacs injectables 4 mg/mL, 500 mL (dans D5%) disponibles dans les cabinets des soins intensifs néonatals
- Conserver à température ambiante
ATTENTION
HAUT RISQUE : Il existe plusieurs présentations et concentrations de lidocaïne, et ce médicament à index thérapeutique étroit représente un haut risque d’erreur; toujours valider la dose et la concentration à administrer par une double vérification indépendante
Indications
Anesthésique local et antiarythmique de classe IB
Anesthésie locale en prévision des interventions suivantes (voir le Guide clinique Prévention et soulagement de la douleur procédurale en néonatologie), en complément aux autres mesures antalgiques :
- Installation d’un drain thoracique
- Ponction lombaire, lorsque les autres options ne conviennent pas
- Intervention chirurgicale mineure impliquant un bris de la barrière cutanée (p. ex. : installation d’une voie fémorale)
Traitement d’arythmies ventriculaires réfractaires (voir les Tableaux de réanimation néonatale – chariots de code rose)
Traitement des convulsions réfractaires (indication non retenue au CHU Sainte-Justine)
Mécanisme d'action
Blocage des canaux sodiques membranaires des fibres nerveuses périphériques entraînant une augmentation du seuil de dépolarisation et un ralentissement de la conduction de l’influx nerveux, ce qui empêche la transmission des signaux de la douleur; en présence de concentrations systémiques significatives, blocage des canaux sodiques des membranes des cellules du myocarde et du système nerveux central; blocage possible des canaux potassiques et calciques
Doses
ATTENTION
Utiliser les fioles injectables 1 % (10 mg/mL) pour l’anesthésie locale; les autres formulations sont réservées au traitement d’arythmies cardiaques, pour l’administration d’une dose de charge IV (seringues injectables de lidocaïne 2 % (20 mg/mL)) ou d’une perfusion IV continue (sacs injectables de lidocaïne 4 mg/mL)
Les formulations combinées avec épinéphrine ne sont pas utilisées pour l’anesthésie locale en néonatologie
Anesthésie locale
Infiltration sous-cutanée ou intradermique
Les doses proposées chez les nouveau-nés se basent sur peu de données et sont surtout extrapolées des doses pédiatriques
Utiliser les doses les plus faibles si le tissu est très vascularisé et chez les enfants prématurés
- Dose usuelle : jusqu’à 0,1 à 0,2 mL/kg de la solution à 1 % (10 mg/mL) (soit 1 à 2 mg/kg) en infiltration sous-cutanée ou intradermique pour une dose
- Administrer au moins 1 à 3 minutes avant la procédure
- Utiliser la plus faible dose nécessaire
- Attendre 2 à 4 heures avant de répéter, si nécessaire
- Dose maximale : 0,3 mL/kg de la solution à 1 % (10 mg/mL) (soit 3 mg/kg)
Préparation, administration et compatibilités
Infiltration sous-cutanée ou intradermique
ATTENTION
Utiliser les fioles injectables 1 % (10 mg/mL)
Ne pas administrer dans des tissus infectés ou inflammés
Pour réduire la douleur au moment de l’injection :
- Réchauffer la fiole entre les mains avant de prélever la dose
- Utiliser une aiguille 27 G ou la plus fine disponible
- Administrer lentement, en 30 secondes
Administrer en infiltration sous-cutanée ou intradermique LENTEMENT, sans rediluer
ATTENTION
NE PAS administrer en intravasculaire, ni dans l’espace sous-dural ou sous-arachnoïdien
Effectuer une légère aspiration avant chaque infiltration; rester attentif aux signes de toxicité systémique étant donné que l’aspiration préalable ne permet pas d’exclure complètement le risque d’injection intravasculaire, sous-durale ou sous-arachnoïdienne
Effets indésirables
Généralement bien toléré; œdème, rougeur et ecchymoses possibles au site d’injection
Effets indésirables systémiques généralement liés à l’administration d’une dose trop élevée ou à une injection intravasculaire accidentelle, et pouvant survenir rapidement après l’injection mais parfois de façon retardée (quelques heures après l’injection); en général, les signes centraux surviennent d’abord et sont suivis des signes cardiovasculaires, mais l’ordre d’apparition inverse est également décrit :
- Effets centraux dépresseurs (sédation, hypoventilation, apnée) ou excitateurs (agitation, vomissements, tremblements, convulsions)
- Effets cardiaques : bradycardie, hypotension, anomalies à l’ECG (allongement de l’intervalle cardiaque PR, élargissement de l’intervalle QRS, anomalie du segment ST), arythmies (bloc auriculoventriculaire, tachycardie ou fibrillation ventriculaire), arrêt cardiaque
Méthémoglobinémie rapportée rarement, le plus souvent en présence d’autres facteurs de risque (p. ex. : déficit en glucose-6-phosphate déshydrogénase (G6PD), conditions médicales ou prise de médicaments prédisposant au développement de méthémoglobinémie (voir les sections Contre-indications et Précautions de la fiche lidocaïne – prilocaïne))
ATTENTION
Bien que rare, la toxicité systémique liée aux anesthésiques locaux est une complication potentielle de l’utilisation de lidocaïne en infiltration locale; les nouveau-nés sont particulièrement à risque en raison de leurs caractéristiques physiologiques et pharmacocinétiques (faible liaison protéique du médicament, immaturité des voies métaboliques)
ANTIDOTES
En cas de toxicité cardiaque :
- Corriger toute hypoxémie ou acidose, qui pourraient aggraver la toxicité de la lidocaïne
- Contacter le centre antipoison : 1-800-463-5060
- Épinéphrine : débuter la réanimation avec les doses usuelles
- Pour réduire les effets proarythmogènes, certaines recommandations adultes proposent de donner des doses plus faibles; débuter la réanimation avec les doses usuelles d’épinéphrine, et valider la suite de la conduite avec le centre antipoison
- En cas d’arythmie ventriculaire :
- En présence d’une arythmie associée à un élargissement significatif de l’intervalle cardiaque QRS (p. ex. : > 120 ms), donner du bicarbonate de sodium
- Si un antiarythmique est nécessaire, privilégier l’amiodarone; éviter les bloqueurs des canaux sodiques (p. ex. : lidocaïne, procaïnamide)
- En cas de toxicité grave ou réfractaire aux traitements de réanimation de première ligne :
- En cas de bradycardie significative : atropine
- Utiliser avec précaution la vasopressine (en débutant avec les doses plus faibles, et en titrant selon la réponse et la tolérance)
En cas de convulsions : lorazépam, phénobarbital; la phénytoïne et le lacosamide sont contre-indiqués
En cas de méthémoglobinémie : bleu de méthylène
- Disponible dans le cabinet de l’unité des soins intensifs de néonatologie
- Dose : 1 mg/kg IV x 1 dose, à répéter après 1 heure si nécessaire
- Ne pas rediluer avant administration, ou rediluer dans NaCl 0,9% si nécessaire pour faciliter l’administration
- Administrer LENTEMENT en 5 à 10 minutes et bien rincer
- Attention, très irritant : administrer par voie centrale si possible, sinon surveiller le site d’administration
- Le déficit en glucose-6-phosphate déshydrogénase (G6PD) est une contre-indication relative au bleu de méthylène : contacter le centre antipoison
Suivi
Le délai d’action est d’environ 1 à 3 minutes après l’injection; la zone reste anesthésiée pendant 1 à 2 heures
Surveillance des signes cliniques de toxicité systémique dans les heures suivant l’injection (sédation excessive, hypoventilation ou apnée, agitation, tremblements, convulsions, bradycardie, hypotension, arythmie), ainsi que les signes cliniques de méthémoglobinémie dans les 24 heures suivant l’injection (saturation, coloration, fréquence cardiaque, états respiratoire et neurologique)
Contre-indications et précautions
Contre-indications
Ne pas combiner avec la crème Emlamd (lidocaïne - prilocaïne) (risque additif de toxicité)
Méthémoglobinémie
Précautions
Traitement avec un antiarythmique (p. ex. : flécaïnide, propafénone, sotalol) ou avec la phénytoïne : effets cardiaques potentiellement additifs en cas d’exposition systémique significative
Bradycardie, bloc cardiaque ou instabilité hémodynamique
Déficit en G6PD